Espèces observées à Douyiet près de Fès (34°03’N 5°07’W) le 14 octobre 2017 par Jacques Franchimont et Mostafa Fareh :
Conditions météorologiques
Visite de 09h30’ à 14h30’, non stop. Ciel quasi serein, vent très faible à modéré de secteur Est ; température voisine des 30°C. Aucune précipitation. La sécheresse de l’été persiste encore de manière très accentuée.
Conditions d’observations
Niveau d’eau du lac occidental très réduit, avec phénomène de « floculation » accentué (remontée de plaques vertes du fond du lac, très visible à la périphérie sud) ; mares périphériques Sud complètement asséchées. Lac oriental totalement asséché également. Sol pulvérulent manquant terriblement d’eau…
Prospection du lac occidental effectuée très lentement à pied sur tout le pourtour du plan d’eau, avec nombreux arrêts ; incursions jusque dans les zones de cultures aujourd’hui très asséchées, et dans les broussailles et les roselières situés à l’ouest du plan d’eau occidental.
Espèces observées
CANARD CHIPEAU (Anas strepera) : environ 150 ex.
CANARD COLVERT (Anas platyrhynchos) : environ 1000 ex.
CANARD SOUCHET (Anas clypeata) : environ 500 ex., débutant leur hivernage, et dont la grande majorité est toujours en plumage d’éclipse estival.
SARCELLE MARBRÉE (Marmaronetta angustirostris) : 2 ex. Espèce patrimoniale importante, devenue rare mondialement.
FULIGULE MILOUIN (Aythya ferina) : une vingtaine min.
FULIGULE NYROCA (Aythya nyroca) : 5 ex. min. Espèce patrimoniale importante, devenue rare mondialement.
ÉRISMATURE À TÊTE BLANCHE (Oxyura leucocephala) : 1 femelle seulement. Début de l’hivernage de cette espèce prestigieuse et fort menacée au niveau mondial.
GRÈBE CASTAGNEUX (Tachybaptus ruficollis) : environ 30 ex.
GRÈBE HUPPÉ (Podiceps cristatus) : environ 150 ex.
GRÈBE À COU NOIR (Podiceps nigricollis) : environ 10 ex.
GRAND CORMORAN (Phalacrocorax carbo) : une centaine environ.
HÉRON CENDRÉ (Ardea cinerea) : une bonne trentaine, pêchant ou se reposant.
GRANDE AIGRETTE (Egretta alba) : 3 ex. Il s’agit du nombre maximal d’oiseaux enregistrés, depuis les premières apparitions de cette espèce européenne en expansion, constatées à Douyièt depuis l’automne 2014.
AIGRETTE GARZETTE (Egretta garzetta) : au moins 25 ex., sans doute en halte de migration.
HÉRON GARDEBOEUFS (Bubulcus ibis) : environ 20 ex., sur les pelouses du Domaine.
CRABIER CHEVELU (Ardeola ralloides) : 3 ex., sans doute en halte de migration.
BIHOREAU GRIS (Nycticorax nycticorax) : une quinzaine (adultes et juvéniles de l’année), en halte de migration.
IBIS FALCINELLE (Plegadis falcinellus) : 1 ex. Encore assez rarement signalée à Douyièt, cette espèce européenne, en forte expansion, est de plus en plus fréquente en hiver au Maroc, où elle s’installe même maintenant très localement pour nicher.
SPATULE BLANCHE (Platalea leucorodia) : un groupe de 12 ex., venant de l’Ouest, survole le lac occidental à basse altitude, sans se poser, puis, découvrant le lac oriental asséché, continue sa route vers l’Est, en direction de Fès ; ces oiseaux pourront éventuellement s’arrêter au Barrage Idriss Ier, où ils sont observés de plus en plus régulièrement. Il s’agit de la 8ème observation connue de cette espèce à Douyièt, la première datant de l’automne 1990 ; c’est aussi la donnée du record maximal du nombre d’individus enregistrés. La Spatule blanche, en expansion en Europe, est de plus en plus fréquente en migration et en hiver au Maroc, même à l’intérieur des terres, lorsqu’elle y trouve des plans d’eau favorables et tranquilles ; depuis plusieurs années, elle y est même maintenant devenue nicheuse, très localement, dans le nord du pays…
ÉLANION BLANC (Elanus caeruleus) : 1 ex. en chasse.
BUSARD DES ROSEAUX (Circus aeruginosus) : environ 5 ex.
ÉPERVIER D’EUROPE (Accipiter nisus) : 1 ex. en chasse.
BUSE FÉROCE (Buteo rufinus) : 1 ex.
TALÈVE SULTANE (Porphyrio porphyrio) : 2 adultes dans les roselières. Espèce sédentaire prestigieuse en expansion au Maroc, ayant découvert à Douyièt les conditions idéales pour son implantation (roselières et tranquillité).
GALLINULE POULE-D’EAU (Gallinula chloropus) : 1 ex.
FOULQUE CARONCULÉE (Fulica cristata) : espèce patrimoniale marocaine importante ; présentes en nombre élevé, mais non dénombrées spécifiquement avec exactitude (voir espèce suivante).
FOULQUE MACROULE (Fulica atra) : présentes en nombre élevé, mais non dénombrées spécifiquement avec exactitude ; total d’au moins 3000 individus du genre Fulica, conjointement avec la Foulque caronculée.
ÉCHASSE BLANCHE (Himantopus himantopus) : 2 ex.
CHEVALIER GUIGNETTE (Actitis hypoleucos) : 1 ex. en halte.
CHEVALIER CULBLANC (Tringa ochropus) : 1 ex. en halte.
MOUETTE RIEUSE (Chroicocephalus ridibundus) : une vingtaine sur le lac, vers 13h00.
PIGEON COLOMBIN (Columba oenas) : une bonne trentaine d’individus ; début de l’hivernage classique de l’espèce, en provenance des cédraies moyen-atlasiques.
TOURTERELLE DES BOIS (Streptopelia turtur) : un oiseau retardataire.
TOURTERELLE TURQUE (Streptopelia decaocto) : une dizaine d’individus, dont quelques chanteurs.
MARTIN-PÊCHEUR D’EUROPE (Alcedo atthis) : 1 ex.
FAUCON CRÉCERELLETTE (Falco naumanni) : un groupe d’au moins 31 ex., posés sur les fils électriques et en chasse, dans les terres de cultures à l’ouest du lac occidental. Espèce mondialement menacée, sédentaire partielle à Fès.
FAUCON CRÉCERELLE (Falco tinnunculus) : 2 couples.
HIRONDELLE RUSTIQUE (Hirundo rustica) : 4 migrateurs.
MÉSANGE NORD-AFRICAINE = MÉSANGE MAGHRÉBINE (Cyanistes teneriffae) : 3 ex. notés au bord du lac occidental.
MÉSANGE CHARBONNIÈRE (Parus major) : 1 ex. Sédentaire comme l’espèce précédente, mais bien plus rare à cette altitude dans le Sais.
BULBUL DES JARDINS (Pycnonotus barbatus) : au moins 10 individus.
BOUSCARLE DE CETTI (Cettia cetti) : 5 chanteurs min., sédentaires dans les roselières.
POUILLOT VÉLOCE (Phylloscopus collybita) : 6 ex. min.
ROUSSEROLLE EFFARVATTE (Acrocephalus scirpaceus) ET/OU ROUSSEROLLE AFRICAINE (Acrocephalus baeticatus ambiguus) : une dizaine d’oiseaux, dont 3 chanteurs en sourdine, dans les roselières. Depuis une récente révision systématique basée sur des analyses génétiques, la Rousserolle effarvatte nichant en Afrique du Nord (dont Douyièt), de même que dans certaines parties de la Péninsule Ibérique, devrait être rattachée à la Rousserolle africaine (sous-espèce particulière ambiguus), et donc séparée de la Rousserolle effarvatte de la plupart des autres régions d’Europe; au Maroc, cette forme ambiguus est une visiteuse d’été localement abondante et une hivernante rare, mais elle est pratiquement indifférenciable sur le terrain (sauf en mains, selon la formule alaire) de la Rousserolle effarvatte, qui peut aussi chanter en migrations (les chants de ces deux taxons ne sont pas séparables à ce jour). L’observation de ce jour correspondant à une période migratoire, il n’est donc pas possible de trancher sur l’identification spécifique précise des oiseaux contactés.
ROUSSEROLLE TURDOÏDE (Acrocephalus arundinaceus) : 1 ex. observé.
CISTICOLE DES JONCS (Cisticola juncidis) : une quinzaine d’individus au total.
GOBEMOUCHE NOIR (Ficedula hypoleuca) : 1 ex. en halte migratoire au bord du lac occidental.
TARIER PÂTRE (Saxicola rubicola) : un couple dans les broussailles à l’ouest du lac occidental.
MERLE NOIR (Turdus merula) : 5 ex. min.
GRIVE MUSICIENNE (Turdus philomelos) : 1 ex. (européen de passage ou hivernant).
PINSON DES ARBRES (Fringilla coelebs) : 7 ex. min.
VERDIER D’EUROPE (Chloris chloris) : 1 ex. min.
CHARDONNERET ÉLÉGANT (Carduelis carduelis) : seulement 1 oiseau noté. L’espèce devient bien rare au Maroc …
LINOTTE MÉLODIEUSE (Carduelis cannabina) : 1 ex.
SERIN CINI (Serinus serinus) : une dizaine d’oiseaux.
MOINEAU DOMESTIQUE (Passer domesticus) : au moins 3 oiseaux dans l’allée principale du Domaine.
Conclusions
La diversité spécifique de l’avifaune mise en évidence au cours de cette visite peut être considérée comme fort bonne.
En dépit de la baisse importante de son niveau d’eau, le lac occidental représente, incontestablement, un pôle d’attraction majeur pour les oiseaux aquatiques migrateurs et en début d’hivernage dans toute la région. Ainsi, les Grands Échassiers, comme le Héron cendré, l’Aigrette garzette et le Bihoreau gris, ont été particulièrement nombreux, beaucoup d’entre eux étant observés en pleine activité de pêche, associés à plusieurs autres espèces plus remarquables encore pour Douyièt, car plus rares à l’intérieur des terres, comme la Grande Aigrette, le Crabier chevelu, la Spatule blanche et l’Ibis falcinelle. De la même façon, les Grands Cormorans, plusieurs espèces d’Anatidés (dont certaines raretés), les Grèbes huppés et les Foulques macroules et caronculées, étaient elles aussi fort bien représentés, de manière fort significative, sur l’ensemble de la zone humide.
Quelques Passereaux en transit, très discrets, stationnaient sur les bords du lac occidental, tels le Gobemouche noir, la Grive musicienne, le Pouillot véloce et les Rousserolles effarvatte et turdoïde. Quant aux Limicoles migrateurs postnuptiaux, ils se sont montrés fort peu nombreux également, suite à l’assèchement total du lac oriental, où des groupes parfois importants sont généralement notés en halte à cette époque de l’année.
La rare et remarquable Talève sultane, sédentaire, est toujours bien installée en petit nombre au sein des roselières, tandis que les environs immédiats du lac occidental constituent toujours les zones de chasse de plusieurs espèces de Rapaces diurnes (Épervier d’Europe, Buse féroce, Élanion blanc, Busard des roseaux, Faucons crécerelle et crécerellette).
Malgré la baisse conséquente du niveau d’eau du lac occidental (avec une augmentation vraisemblable de la salinité), et malgré le phénomène de « floculation » constaté, aucune mortalité particulière des oiseaux d’eau ne semble heureusement se produire pour le moment ; les rares « plumées » observées sur le pourtour du lac (Hérons gardeboeufs et canards) correspondent, apparemment, à la conséquence d’une prédation naturelle normale due aux attaques de rapaces ou de mammifères (Chacal ou Renard p. ex.).