La Commission de l’Avifaune Française (CAF) vient d’entériner la mise à jour de la systématique des fauvettes « passerinettes » :
La systématique et la nomenclature des fauvettes « passerinettes » au sens large sont en cours de révision depuis le milieu des années 2000. Le statut des populations de Corse, Sardaigne et Italie centrale comme espèce à part entière, la Fauvette de Moltoni Sylvia subalpina, était déjà entériné par la plupart des listes mondiales, dont l’IOC, et donc par la CAF.
Une étude récente (Zuccon et al. 2020) vient de proposer la reconnaissance de trois espèces dans ce groupe, en suggérant que les populations de Méditerranée occidentale (France et Péninsule ibérique essentiellement) et d’Afrique du Nord (Tunisie, Algérie et Maroc) soient traitées comme une espèce distincte des populations d’Italie méridionale, des Balkans et de Turquie. Ils reconnaissent en outre deux sous-espèces pour l’espèce orientale, alors que l’espèce occidentale est selon eux monotypique. Zuccon et al. (2020) ont analysé en détail la nomenclature de ce groupe et ont proposé les noms suivants : Sylvia iberiae pour l’espèce occidentale et Sylvia cantillans pour l’espèce orientale, avec les sous-espèces S. cantillans cantillans (Italie méridionale) et S. c. albistriata (Balkans et Turquie).
L’IOC a accepté ces conclusions dans sa dernière mise à jour publiée et la CAF adopte donc pour la liste française une taxonomie à trois espèces. En outre, suite à la phylogénie des Sylviidae publiée par Cai et al. (2019), l’IOC a adopté la nouvelle taxonomie générique recommandée par ces auteurs et placé la plupart des fauvettes dans le genre Curruca (seules les Fauvettes à tête noire et des jardins demeurent des Sylvia dans la LOF). Là encore la CAF suit cette nouvelle taxonomie.
En résumé, les fauvettes du groupe « passerinette » de France comprennent maintenant trois espèces :
- Fauvette de Moltoni Curruca subalpina (monotypique, nicheuse en Corse) ;
- Fauvette passerinette Curruca iberiae (monotypique, nicheuse en France continentale) ;
- Fauvette des Balkans Curruca cantillans (accidentelle en France, sous-espèces cantillans nicheuse en Italie méridionale et Sicile, sous-espèce albistriata nicheuse dans les Balkans et en Turquie).
Pour le Maroc, ceci donne :
- Fauvette de Moltoni Curruca subalpina (monotypique, migrateur)
- Fauvette passerinette Curruca iberiae (monotypique, estivant nicheur)
- Fauvette des Balkans Curruca cantillans (possible accidentelle, sous-espèces cantillans nicheuse en Italie méridionale et Sicile, sous-espèce albistriata nicheuse dans les Balkans et en Turquie).
L’espèce monotypique ‘iberiae’ inclut les oiseaux d’Afrique du Nord (ancienne sous-espèce ‘inornata’) car ils sont pratiquement impossibles à distinguer et ne présentent aucune différenciation génétique avec ceux de Méditerranée occidentale (essentiellement ibérique).
La publication de Zuccon et al. est intéressante, mais je me pose une question à son sujet: les échantillons marocains du MNHN ont tous été collectés le 2 juin 2013, dans des oasis du Tafilalt. La date correspond bien a une période de nidification, mais l’espèce est inconnue comme nicheuse dans ces milieux (cf thèse de Rémi Destre), le secteur de nidification le plus proche étant à ma connaissance la région au sud de Tounfite: problème de localité inexacte ou date erronée???
Bref, une incohérence apparente qui, je l’espère, ne remettra pas en cause les résultats globaux de l’étude, qui repose sur un échantillonnage faible pour le Maghreb (5 oiseaux de même localité à problème au Maroc, aucun d’Algérie, et 1 de Tunisie, collecté en mai…)